Synopsis :
GROS, P. LA GAULE NARBONNAISE. DE LA CONQUETE ROMAINE AU IIIE SIECLE APR. J.-C. . PARIS, 2008, 166 p.,color laminas. Encuadernacion original. Nuevo.
Extrait:
NAISSANCE DE LA GAULE NARBONNAISE
LA GAULE TRANSALPINE AVANT ROME
Dans son plaidoyer en faveur du gouverneur M. Fonteius, Cicéron soulignait en 70 av. J.-C. que cette province était faite d'une grande diversité de populations (Pro Fonteio, 5, 12-13). Cette remarque, destinée à introduire un développement sur la sauvagerie et l'instabilité du substrat indigène, rend bien compte, pour peu qu'on la dépouille de ses intentions polémiques et partisanes, de la réalité d'une région fort vaste qui n'a effectivement jamais présenté de réelle unité ethnique.
La partie de la Gaule que les Anciens appelaient la Transalpine, et dont les limites exactes demeureront floues jusqu'à la réorganisation administrative d'Auguste, est bornée au sud par la Méditerranée entre le fleuve Var et les Pyrénées, au nord-est par le lac Léman et le cours supérieur du Rhône, au nord-ouest par les Cévennes et les contreforts du Massif central ; elle englobe à l'ouest la haute vallée de la Garonne. Il s'agit donc d'un énorme territoire qui, en termes de géographie moderne, s'étend de Genève à Marseille en excluant toutefois le coude du Rhône et la région de Lyon, et des Alpes-Maritimes à l'ouest de Toulouse; en termes de topographie antique, elle contrôlait deux des axes les plus importants du monde méditerranéen occidental, à savoir la moyenne et la basse vallée du Rhône et les voies qui d'Italie parles Alpes ou le littoral gagnaient l'Isthme gaulois et la péninsule Ibérique. Terre de rencontres et de conflits, elle a toujours constitué pour les puissances à vocation hégémonique un enjeu essentiel, et Rome devait rapidement, en raison de ses conquêtes espagnoles, éprouver le besoin de la rendre plus sûre puis de la conquérir.
Les populations les plus anciennes, qui sont aujourd'hui considérées comme les véritables autochtones, appartiennent à la nébuleuse des Ligures, que les Grecs appelaient «Ligyes», et dont le domaine originel, dès le néolithique, couvrait les Alpes du Sud dont ils «gardaient» les cols jusqu'au littoral (fig. 1). Le problème est celui de son extension vers l'ouest : si le Rhône ne semble jamais avoir constitué une limite, les textes anciens, en particulier celui d'Avienus (Ora Maritima, 612-613), désignent l'Hérault, l'antique Oranos, comme la frontière entre la terre des Ibères et celle des «rudes Ligures». S'il est bien évident qu'on ne saurait donner à ce mot de frontière un sens clair et immuable, l'archéologie confirme malgré tout, avec les travaux de M. Py, A. Nickels et D. Garcia, qu'au-delà de l'Hérault règne sans exclusive mais majoritairement un habitat, des types monétaires et une métrologie nettement différents de ceux qu'on observe en Languedoc oriental et en Provence, et qui s'apparentent à ceux des Ibères. Ceux-ci, non pas venus d'Espagne comme on l'a souvent dit, mais participant de la même culture que leurs voisins du sud des Pyrénées, ont en effet, dans le Languedoc occidental, occupé une place prépondérante, qui n'excluait pas des incursions périodiques, même si l'on tend à mettre aujourd'hui l'accent sur une expansion ligure aux dépens des territoires «ibériques». Quoi qu'il en soit ces deux peuples, de plus en plus mêlés à mesure qu'on progresse vers l'Occident, ont fini par développer de part et d'autre du Rhône une forme de civilisation protohistorique qui, dans la diversité des faciès régionaux de mieux en mieux identifiés par les fouilles récentes, présente une réelle originalité par rapport au reste de la Gaule (fig. 2).
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